Bloody Sunday, hommage à la résistance irlandaise 12-02-2003



Chaque lutte de libération a ses témoins silencieux. Des images instantanées, souvent nettes et choquantes, qui donnent un visage à la lutte. Pour les Irlandais, il y a Bloody Sunday... Le film de Peter Greengrass met fin à trente ans de mensonges britanniques.

La lutte anti-impérialiste irlandaise

Le dimanche 30 janvier 1972, des paracommandos britanniques attaquent une marche de protestation pacifique dans les rues de la petite ville de (London) Derry, nord de l'Irlande. Les paras ouvrent froidement le feu sur une foule d'environ 20.000 manifestants (3 à 5.000 selon la police...). Ils abattent treize manifestants, parmi lesquels six jeunes de 17 ans. La fusillade fait autant de blessés graves. Dont l'un portera le bilan final à quatorze victimes.
Ce massacre perpétré en plein jour est devenu le symbole sur lequel se sont cristallisées la résistance et la haine contre l'impérialisme britannique en Irlande. John Lennon et U2 ont créé deux chansons intitulées tous les deux Sunday, bloody Sunday qui ont donné à l'événement une notoriété mondiale. Le film de Peter Greengrass est une reconstruction quasi-documentaire des faits. Il entraîne le spectateur au cur de la manifestation, qu'il vit pour ainsi dire en chair et en os.
Avec une caméra vive, en mouvement, (à l'épaule comme chez les Frères Dardenne), le film suit la manifestation pour l'égalité des droits. Depuis la conférence de presse annonçant avec assurance la tenue de la marche jusqu'à celle clôturant la marche et durant laquelle les organisateurs brisés lisent en pleurant la liste des morts. Minute après minute, la caméra passe impitoyablement du camp des manifestants à celui de l'armée britannique et vice-versa. D'un côté, le décor gris, sans prétention, des quartiers ouvriers, l'idéalisme pacifique des organisateurs, la bonne entente entre protestants et catholiques. Et en face, le calcul froid et l'arrogance des puissants, de l'impérialisme britannique.
Le verdict du film est implacable. Il balaye la thèse des Britanniques, qui prétendent encore aujourd'hui que les paras avaient d'abord subi des tirs de l'IRA avant d'entrer en action. De même que le jugement du Widgery Tribunal, commission d'enquête soi-disant indépendante, qui a estimé que les soldats n'étaient pas coupables de l'assassinat des treize civils. Un film courageux. A voir absolument.

Les Palestiniens blancs

Bloody Sunday n'a pas la prétention d'être un drame social comme seuls les Irlandais sont capables de les créer: In the name of the father, His mothers son, Michael Collins et beaucoup d'autres. Mais il donne matière à réfléchir sur l'impérialisme d'aujourd'hui et sur la résistance. Dans ce film, nous voyons à l'uvre ces mêmes Britanniques qui, aujourd'hui, veulent faire la morale à l'Irak et au monde entier en matière de droits de l'homme: aucun soldat britannique, ni a fortiori aucun commandant n'a jamais été condamné. Il suffit par ailleurs de remplacer «Irlandais du Nord» et «catholique» par «Palestinien» et «islamique» ou l'IRA par le FPLP pour être frappé par la ressemblance...
Luk Vervaet

(Le film Bloody Sunday n'aborde pas les causes qui ont conduit au bain de sang. Mais il incite à chercher plus loin et à approfondir l'histoire de la résistance irlandaise. Par exemple via les écrits brillants de Marx (www.marxists.org/francais/marx/works/1867/Capital-I/km capI-25-5-f.htm) et Engels sur l'Irlande, les sites internet de l'IRSP ( http://irsm.org/irsp ) et du Sinn Fein ( http://sinnfein.ie ), d'excellents livres comme Before the dawn et The politics of Irish Freedom de Gerry Adams).

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