Ali Aarrass, un ancien prisonnier à la tête de l’Observatoire rifain des droits humains
Intervention de Luk Vervaet à la rencontre des Rifains de la diaspora européenne organisée par le Parti National Rifain. Bruxelles, 31 mai 2025
Chers amis, chers camarades,
Merci pour l’invitation à votre événement. Je suis heureux de me retrouver parmi vous et parmi les militants sahraouis ici présents.
Je ne peux commencer mon intervention que par une pensée pour Gaza, pour le peuple martyr de la Palestine. Plus de six cents jours de génocide, avec en moyenne plus de cent enfants, hommes et femmes assassinés chaque jour. Avec plus de dix mille prisonniers derrière les barreaux, maltraités comme jamais auparavant et torturés dans des camps de détention à la Guantanamo.
L’histoire retiendra que le monde occidental a été du côté des génocidaires jusqu’au bout Tout comme le fait que le Maroc s’est retrouvé du même côté, en échange de la reconnaissance de la marocanité du Sahara occidental par les pays occidentaux.
L’histoire retiendra l’incroyable courage et la résistance du peuple palestinien qui lutte, non pas depuis le 7 octobre 2023,mais depuis la Nakba en 1948. Ce peuple et sa résistance nous inspirent. Ils nous disent : ne jamais abandonner la lutte, ne jamais se rendre, lutter même sans avoir la certitude de connaître personnellement la victoire.
L’enjeu du 7 octobre 2023 était la libération des prisonniers palestiniens. La question des prisonniers et de prisonnières est toujours au cœur de chaque révolution. Que ce soit en Afrique du Sud avec Nelson Mandela et ses camarades, en Irlande avec Bobby Sands et ses camarades, au Maroc avec Nasser Zefzafi et ses camarades.
Chers amis,
vous avez mis un ancien prisonnier à la présidence de l’Observatoire rifain des droits humains. C’est un geste extrêmement fort que nous célébrons aujourd’hui. Quand Farida Aarrass, la sœur d’Ali, et moi-même avons commencé, avec d’autres, le comité Free Ali en 2008, on n’aurait pas pu imaginer un tel événement. Il y a 17 ans,en dehors de Melilla et de Molenbeek, Ali était un homme inconnu du grand public, inexistant et nié par les autorités. Aujourd’hui, Ali Aarrass est nationalement et internationalement connu et réputé grâce à une campagne de solidarité sans précédent, et grâce à sa résistance dans les prisons espagnoles et marocaines.
Vous avez mis un homme à la tête de l’Observatoire à qui vous pouvez faire confiance.
Parce qu’en tant que travailleur, Ali fait partie de ces binationaux qui ont connu la dureté de l’immigration.
Parce qu’en tant que prisonnier, il a subi les mêmes traitements qu’un prisonnier palestinien.
Parce qu’en étant de nouveau libre, il n’a pas hésité à témoigner publiquement contre les bourreaux marocains et espagnols dans son livre Le ciel est un carré bleu, écrit en collaboration avec Lucie Cauwe, ici présente.
Ali Aarrass a été innocenté par le juge espagnol Baltasar Garzón. Mais, il a été extradé et a fait douze ans de prison en tout dans dix prisons espagnoles et marocaines différentes. Il a subi la torture physique pendant dix jours à Témara, torture confirmée par Juan Mendez, le rapporteur de l’ONU, et la torture psychologique par l’isolement extrême en Espagne et au Maroc. Ali Aarrass a résisté par six longues grèves de la faim, trois en Espagne, trois au Maroc. Il a organisé une grève de l’hygiène, puis une grève de la marche. À partir de la prison de Salé 2 il a organisé, avec Farida Aarrass et le Comité Free Ali, une récolte de chaussures et de vêtements pour les prisonniers les plus pauvres. À la prison de Tiflet, Ali a été désigné comme délégué des prisonniers. Il y a rédigé plusieurs programmes de revendications très concrètes pour obtenir des couvertures, de l’eau chaude dans les douches, des horaires fixes pour le préau, de la nourriture chaude et du pain propre, pour l’installation d’une boîte aux lettres, pour le respect du secret professionnel médical. Mais aussi pour exiger l’arrêt de la violence et de la maltraitance à l’égard de ses codétenus et des sanctions contre les auteurs.
Jusqu’à ce jour, l’affaire Ali Aarrass est toujours en cours pour obtenir reconnaissance, réparation et dédommagement. Cela ne lui empêche pas de se mobiliser pour les militants toujours détenus dans les prisons marocaines.
Pour conclure, je lui offre ce poster que nous avons utilisé pendant la campagne pour sa libération. On peut y lire le texte de la déclaration des droits humains. Qu’elle soit son guide dans le lourd travail qui l’attend.
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